(Est-ce que je fais des romans graphiques, BD, etc, parce que j'ai pas le temps de lire ? Parfaitement)
Le Patient, de Timothé Le Boucher vient de sortir il y a peu. Il s’agit d’un roman graphique qui relate l’histoire d’un jeune homme, seul survivant d’une tuerie qui a ravagé sa famille quelques années plus tôt, et celle de sa thérapeute.
Bon, ça c’est l’histoire vendue, la quatrième de couverture, le petit résumé que certains lisent pour se donner une idée. J’ai simplement feuilleté les planches pour me décider ; je suis tombée sur un extrait particulièrement onirique, une affaire de regard et d’eau un peu trouble qui transforme les éléments. Les tons pastels et la simplicité du trait amènent à un jeu différent que dans certains ouvrages : tout est une question de mouvement selon moi.
Les yeux, les cheveux surtout et les corps amènent à une finesse de l’interprétation. Parce que c’est de ça qu’il s’agit, oui il y a une histoire de thriller et on s’accroche aux pages pour savoir la suite.
Savoir la vérité.
Mais est-ce que c’est vraiment là que se trouvait l’essentiel ?
Pour ma part, non. Je suis peu sensible aux effets de suspens même si je suis tombée dans le panneau ; j’ai été très surprise du déroulement de l’histoire. La narration est réussie — je ne savais absolument pas dans quoi je m’embarquais mais pour sûr, j’étais embarquée — et il n’y a pas de moment plat, lassant. Tout est déroutant mais surtout. le tout, pris dans sa globalité.
J’ai eu l’impression qu’une autre histoire se déroulait en filigrane, d’autres sujets, sérieux, précieux se découpaient dans les non-dits. À noter que c’est le personnage principal qui raconte sa propre histoire dans le final, peut être manque-t-il de subjectivité ou de recul, d’honnêteté dans ses propos.
J’ai adoré sans pourtant réussir à cerner le tout. Incapable de discerner les réelles intentions de l’auteur, j’ai regretté que l’histoire ne prenne pas un certain chemin (on était à deux doigts d’une sensualité à mi-mot, et en fait non, bonjour l’horreur) sans pour autant être déçue du réel proposé. Ordinairement, j’arrive à savoir où veut nous emmener le créateur mais pour le coup, je serais incapable de dire si ce que je discerne est réel ou si la bande dessinée est intégralement déformée par.. et bien par moi.
En tout cas c’est un sacré roman qui se tient très bien en one shot. L’univers est clos, misérable mais rose — avec du rose ou peut tout montrer je crois — mais j’étais un peu déçue que l’onirisme des premières pages s’en aille. La poésie, ça sert souvent un propos, ou alors ça propose quelque chose en plus. Parfois ça se trouve dans la beauté des mots ou des dessins, dans la représentations d’idée ou de concepts. J’ai trouvé ce que je cherchais dans un regard de trois-quart et un corps nu qui s’enfonce dans l’eau.
Quelques planches hors du temps qui ponctuent le départ et puis, plus rien. La subtilité reste, elle, heureusement ; je garde quelques planches favorites quand même. La jeune femme qui glisse dans l’eau, la paralysie du sommeil, les cheveux longs du personnage principal, l’explication de l’accident de la route sans paroles, Dylan qui essuie sa tempête personnelle dans le lit de l’autre, le handicap comme colère ou comme fardeau, lourd, silencieux.
Chacun sa chimère, mh ?
Bref, c’est chouette, allez donc vous en emparer. Qu’il soit adoré ou qu’il rende sceptique c’est le genre de travaux qui fait réfléchir. Et ça, ça a jamais fait perdre de temps à qui que ce soit, si ?
(je lance souvent des appels à contribution, parce que l’avis des autres m’intéresse vraiment, et aussi parce que ça m’aide à modérer le mien)
Mesdames et messieurs, Laure.
« Tiens lis ça, jette pas mon livre par la fenêtre stp ». Voilà comment on m’a un peu pitché cette BD. Curieuse et n’ayant plus rien à lire ce jour là, j’ai donc commencé.
La lecture de cette BD est extrêmement fluide, les bulles bien placées, le dessin bien exécuté. Les couleurs désaturées rendent bien et les personnages sont maîtrisés. À aucun moment je n’ai eu de question sur le sens de lecture ou pour comprendre une case. Le fait que les couleurs ne soient que des aplats simples rendent parfaitement bien pour une lecture rapide et sans prise de tête. Le but d’une BD étant d’abord la narration, on ne doit pas s’arrêter sur chaque case, cela nous sortirait de l’histoire.
Timothé joue avec nos sentiments et notre empathie avec les personnages avec brio. On s’attache forcément à Pierre, personnage principal de l’histoire, personnage que l’on suit à travers ces deux cents pages. Et puis, lors du moment fatidique, forcément que l’on tombe des nues. À aucun moment (en réalité, un personnage pose une fois la question) on ne s’attend à ce drame. Et la narration prend une toute autre forme. On ne voit plus Pierre d’un point de vue extérieur, on connaît désormais ses pensées et cela est très bien amené. Il y a donc deux tons différents dans cette histoire, qui imposent alors, à leur manière, deux rythmes différents.
Cette histoire, bien que bouleversante à différents points de vue, m’a fortement plu. Je regrette néanmoins le manque d’onirisme qui peut être présent sur certaines cases du début et qui disparaît totalement le reste de la BD. J’aurais aimé que cet aspect visuel revienne de temps à autre, apportant ainsi un troisième rythme à l’histoire, ainsi qu’une nouvelle narration et une autre manière d’appréhender celle-ci.
Je ne peux que recommander Le Patient à d’autres personnes.
Comments